Chroniques lancéennes
1) Hommage à Germaine Rivollet-Déthiollaz
Chronique parue dans « Le Lancéen » de février 2017.
Germaine Rivollet-Déthiollaz à l’exposition de Lancy d’Autrefois en 2013.
Le 12 janvier s’éteignait à l’EMS des Mouilles une personnalité attachante du village du Grand-Lancy, Madame Germaine Rivollet-Déthiollaz.
Pour notre association, Germaine était un témoin précieux de la vie d’autrefois: née en 1916, elle a traversé le XXème siècle et assisté au développement de notre commune où elle est née, s’est formée, a travaillé et fondé une famille aux côtés de Pierre Rivollet. Fille d’Adrien-Louis Déthiollaz, propriétaire de l’Auberge des Communes Réunies qui fut notamment secrétaire de mairie à Lancy, président de l’Association des Intérêts du Grand-Lancy, mais également député et président du Grand Conseil, pour les Lancéens elle était surtout, avec ses quatre sœurs Emilienne, Raymonde, Marthe et Marie-Louise (la célèbre Zinette), l’âme de cet emblématique café.
A la création de Lancy d’Autrefois en 2009, Germaine fut la seule et la première habitante de Lancy à nous ouvrir ses archives dans lesquels nous avons puisé tant de belles anecdotes, photos et documents qui ont servi à l’élaboration de nos différentes expositions. Avec sa fille Françoise Antich, elle nous a permis de nous plonger dans les histoires familiales qui la rendaient à la fois heureuse, mais également nostalgique d’un passé qui ne l’avait souvent pas épargnée. Ces retours aux sources n’étaient pas sans conséquences pour elle, lui enlevant souvent le sommeil, l’agitant plus que de raison et inquiétant son entourage. Non contente de nous permettre de scanner l’essentiel des photographies de sa famille, elle a fait don d’une importante quantité de documents pour la plupart provenant de son père, nous transmettant ainsi les archives impeccables d’un homme méticuleux et ordonné, passionné par la vie de sa commune. Germaine reste donc pour nous une femme d’exception qui a su voir l’intérêt de son cher Lancy avant toute autre considération d’ordre personnel.
Nous tenons ici à remercier tout particulièrement sa fille Françoise qui l’a soutenue dans cette démarche et l’a aidée à affronter les fantômes du passé avec courage et générosité. Et, à titre personnel, je remercie ces deux personnalités attachantes qui m’ont maintes fois reçue dans l’appartement familial de la Ferme Roch pour partager des moments d’exception autour du fameux gâteau de Savoie, dont la recette secrète et délicieuse se transmet chez les Rivollet-Déthiollaz de génération en génération.
Kaarina Lorenzini, Présidente de Lancy d’Autrefois
2) La Villa Rapin
C’était il y a 61 ans…, mais c’est plus actuel que jamais!
Chronique parue dans « Le Lancéen » de mars 2013.
«Dans une récente séance, le Conseil municipal de Lancy a décidé l’achat d’une propriété bâtie qui se trouve au Grand-Lancy, à proximité du Château-Mairie, et qui est connu sous les noms de « Mon Repos » ou « Campagne Rapin ». Elle appartenait à Mme Bonna-Rapin. Le Conseil d’Etat a ratifié cet achat». Ainsi commence l’article écrit par Pierre Bertrand et paru dans « La Tribune de Genève » du 31 mai 1952. Intitulé « La Municipalité de Lancy achète la propriété Rapin », il explique les motivations qui ont poussé la commune à acquérir ce lieu imprégné d’histoire. L’actualité a remis en lumière cette propriété, suite à l’agrandissement de la Mairie avec la construction du nouveau bâtiment administratif et la démolition d’une partie de l’ancienne école Rapin (voir notre article en page 15).
Motifs de cette acquisition
Pierre Bertrand donne, dans son article, quatre motifs à l’acquisition de cette propriété par la Commune:
– sa conservation en tant que maison «à l’aspect plaisant» qui, de surcroît «protège les abords du parc du château contre la construction d’immeubles locatifs»;
– son emplacement idéal au cœur du village qui compense l’amputation d’une partie du parc du château dans sa partie inférieure avec l’extension de la Gare de La Praille;
– «l’établissement au Grand-Lancy de deux à quatre nouvelles classes d’école […], ce qui éviterait de construire un bâtiment neuf, beaucoup plus coûteux ou de transformer intérieurement le château qui ne s’y prête que difficilement»;
– et enfin, «l’achat de la propriété Rapin permettra, car la maison n’est pas à front de route, l’élargissement de la route cantonale […]».
Beaucoup de ces motifs donnent à sourire maintenant, tant cette partie du village a changé. La plupart des propositions invoquées par Bertrand se sont effectivement réalisées, mais ont été ensuite abandonnées au gré de l’urbanisation et du développement communal.
Des Lullin aux Rapin
Pour Bertrand, il semble difficile de dater cette maison. Par contre, il arrive sans peine à nous livrer le nom de ses propriétaires successifs entre le XVIIIème siècle et le XXème siècle, dont certains aux noms prestigieux tels que les Lullin, ou les Pictet-de-Rochemont. Elle appartint ensuite à un certain Jean-Philippe Monod, menuisier de son état, puis à Fanny Brugnier ou Bougnier (Pierre Bertrand utilise en effet deux orthographes différentes pour nommer la même personne), à Alexandre Isnard-Le Cointe et enfin à Eugène Rapin, docteur en médecine. La propriété resta 70 ans dans la même famille, avant de devenir bien communal. Et Pierre Bertand de conclure joliment son article: «Le hasard veut que l’emplacement des anciennes fermes de Pictet-de-Rochemont soit de nouveau remembré avec le château-mairie, et c’est là un heureux destin». A moins d’une année des célébrations de l’adhésion de Genève à la Confédération, événement auquel Charles Pictet-de-Rochemont le plus célèbre des Lancéens, prit une part active, et de l’achèvement de l’agrandissement de la Mairie de Lancy, son ancien château, cet article que nous a aimablement été remis par notre ami Michel Fontaine est doublement d’actualité.
Kaarina Lorenzini, Lancy d’Autrefois
3) Hollywood sur Petit-Lancy
Au début du XXème siècle, Lancy fut durant quelques années la cité du cinéma en Suisse. Le long de la route de Chancy, au n° 285, se dressait une superbe bâtisse en bois qui abrita le 1er studio cinéma de suisse.
En 1915, le comique français Max Linder, démobilisé pour des raisons de santé, se voit confier diverses missions de propagande en Suisse. C’est dans l’atelier du Petit-Lancy qu’il va filmer « Max et la main qui étreint », tourné avec les moyens de fortune, et une partie de « Max entre deux feux » (ou « Max entre deux femmes ») qu’il terminera par la suite aux « Studios Essanay » à Chicago.
Le 4 janvier 1918, le studio est repris par Alfred Lind et cela est relayé par la presse romande qui annonce l’ouverture d’un établissement de prises de vues cinématographiques, sous le nom d' »Alfred Lind Sensational Film » pour le compte d’une compagnie allemande. Des ouvriers, des décorateurs, des tapissiers et des peintres y construisirent des décors et du matériel. Pionner du film danois, Lind s’adonnait à de mystérieuses activités (espionnage) derrière les portes closes de son studio, tout en encourageant les Romands à tourner leurs propres films. Le 22 novembre 1919, la « Revue suisse du Cinéma » annonce que Lind vient d’acquérir le studio du Petit-Lancy dont il n’était jusqu’à présent que locataire. Il est question d’une très grande activité dans le studio. C’est là que Lind et son opérateur allemand Paulus commencent à construire parteillement les intérieurs d’un second film « Cirque de la mort ». Le studio du Petit-Lancy vit aussi se réaliser le film « Jackie se marie ».
L’effervescence de ces studios galvanise les cinéphiles en herbe genevois qui, dès 1919, envisagent concrètement de se lancer dans le cinéma, comme Léon Tombet et Robert Florey en tête. Cette euphorie dure de 1920 à 1924, date où les sociétés cinématographiques romandes poussent comme des champignons. On peut alors compter jusqu’à 7 sociétés de films!
En octobre 1922, deux industriels et opérateurs de la maison Gaumont à Genève, MM. Wullimann et Chanal rachètent à Alfred Lind le studio du Petit-Lancy et fondent leur propre compagnie sous le nom de Rodanus-Film avec le leitmotiv: «Nous filmons tout: mondanités, réceptions, congrès». Ils tournèrent le film « Polydor détective » et « Le satyre du Bois-Gentil », avant que leur société ne fasse faillite en 1926. Ce fut la fin de l’aventure cinématographique à Lancy.
Une bien triste fin…
Les studios furent repris par la menuiserie Milano et Mestral, puis par l’entreprise de transports Blanchard Genève-Lausanne, jusqu’au début des années 1980. Le 12 mai 1986, Jean-Pierre Arn rédigea un article dans le « Journal de Genève » mentionnant que le bâtiment était en péril: il y indiquait que cet édifice était doté d’une charpente et d’une verrière uniques à Genève et qu’un projet d’immeuble était projeté sur cette parcelle. Dans son article, il précisait que, selon des architectes, les murs étaient solides et une remise en état pas trop lourde serait envisageable. C’est pourquoi le groupe socialiste interpella le Conseil municipal le 30 avril 1986, afin de remettre en cause le PLQ et de conserver cet édifice ou de le tranférer ailleurs, d’autant qu’il avait été déclaré intéressant par le Service des monuments et des sites et qu’un besoin de locaux pour la jeunesse se faisait sentir. Armand Brulhard qui une chronique d’architecture dans le « Journal de Genève », mentionne d’ailleurs dans un article que ce bâtiment fait partie d’une rareté parmi les constructions du début du XXème siècle. Mais peu de temps après, un soir d’été, un incendie mit un terme à l’existence de ce bâtiment unique dont nous voulions ici retracer son parcours peu commun.
Alain Eretzian, Lancy d’Autrefois
Sources « Histoire du cinéma suisse » de Hervé Dumont, Lausanne, 1987 « Journal de Genève », édition du 12 mai 1986 « Histoire de Lancy », édité par la Ville de Lancy Jacques Barrelet, Archives d’Etat de GenèveTémoignages
1) “Ma terre genevoise”
Hommage au quartier de La Chapelle et au Village du Grand-Lancy
Témoignage paru dans « Le Lancéen » de février 2017.
«J’aime ses verts bocages, avec ses sols parfumés. Elles ont belle allure ces mottes de terre luisantes sous le soleil, avec l’odeur champêtre où s’exhale le parfum des bêtes qui la travaillent parmi les sous-bois ver- doyants, que bordent de petits chemins luxuriants.
Au-travers de cette campagne minuscule, ma campagne apprivoise des petits bois dont elle regorge à souhait. Elle seule sait garder le secret, afin de les conserver bien au frais à l’ombre des nuages gris qui parfois pleu- rent de compassion.
J’aime mon coin de terre où je suis né; la vie nous force à prendre soin de lui si cher à notre coeur. Parfois une rivière le traverse du nord au sud pour rejoindre son maître, le grand fleuve.
Les deux chevaux de Monsieur Roch, le Marquis et la Belle, tirent la charrue dans les champs qui l’entourent. En hiver, lorsqu’iI y avait de la neige, ils étaient sollicités par la commune de Lancy pour déneiger les rues. C’etaient des bêtes de somme très intelligentes, puissantes et qui nous remplissaient de respect.
Tellement d’événements se sont passés, mais je relaterai encore les “Pites-Pates” (deux sœurs couturières) qui, derrière leur petite fenêtre ouverte, actionnaient infatigables leur machine à coudre … tic-tat – tic- tac – tic-tac».
Michel Fontaine
2) «Te souviens-tu?»
Témoignage paru dans « Le Lancéen » d’avril 2012.
Elle est toujours là, mon amie, ma rivière, l’Aire, pour ne pas la nommer. Elle efface mes colères d’enfant qui vient de se faire sermonner pour quelque bêtise; résultats scolaires fâcheux ou bagarre entre copains du village? Revenons à notre rivière. 100 mètres plus bas, un pêcheur savoure un moment de tranquillité sur la grève en essayant vainement d’accrocher un poisson rétif qui, l’on pouvait le constater de visu, après une sortie de l’eau à ras la surface, créait un arc d’argent lumineux, puis disparaissait aussi vite que l’éclair.
En fait, à croire que le paradis sur terre se trouve sur les bords sablonneux et glissants de ma rivière. Il faut alors faire attention à ne pas culbuter dans les flots. Mes trois cailloux volumineux et verdâtres sortent de l’onde. Ils abritent une immense famille de têtards et de petites grenouilles bien au calme. Soudain, trois coups de sifflet d’un voisin habitant la Maison de l’Horloge me font savoir qu’il est midi: fin de la rêverie.
Pensons à remonter la Vil-Gueue au pas de course, sinon…. Derrière moi, le pont se reflète dans l’eau, gris, vert, avec des touches noires d’humus.
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Les dimanches, nous jouions au mariage avec procession, ou à la dînette. Après l’école, c’était les parties de cache-cache au Château avec les gosses du quartier. Le jeudi après-midi, au patronage Saint-Louis dirigé par les soeurs de Saint-Vincent-de-Paul avec leurs grandes cornettes blanches, nous jouions au jeu de l’araignée. Un jeu que nous aimions beaucoup, c’était jouer à buche ou au “coillus”. Bien évidemment, il y avait pour nous occuper les jeux de la marelle, saute-mouton, la corde à sauter, le roulage de cerceaux ou de vieux pneus de voitures sur les trottoirs, les frondes, etc…
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L’automne venu, nous récoltions des marrons pour les porter chez Vecchio pour ses cochons. Quelques petits sous étaient toujours les bienvenus au fond de nos poches vides.
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L’hiver, dans le champ Pillet, les descentes en luge étaient extraordinaires. Quand le printemps arrivait, avec un petit char nous allions à la quête de journaux que nous entassions contre l’entrée de l’école, au grand dam de M. Kauffmann, le concierge, tout ceci, afin de financer un tant soit peu notre course d’école au mois de juin.
Le soir, à la tombée de la nuit, grand rendez-vous devant le café Fazan avec comme but, attaque contre la seule ampoule du village.
Tout ceci nous étonne maintenant d’avoir possédé autant de temps pour jouer… Mais laissons le temps au temps. Souvenirs, souvenirs … Mon village était vraiment sympa et plein de vie, nous étions heureux d’y vivre.
Michel Fontaine
3) Gamins du village, sur la route d’amitié
Témoignage paru dans « Le Lancéen » de septembre 2011.
Les Scouts…
Le Patro…
Le jeudi après-midi, nous avions le patronage avec les sœurs de Saint-Vincent de Paul et leurs grandes cornettes blanches que ma mère lavait, repassait et amidonnait. Elles nous faisaient jouer à l’araignée autour de l’église. Pendant ce temps, Ernest Kauffmann labourait le jardin contigu aux deux salles Saint-Louis. Il y avait même un terrain de boules auprès d’un superbe noyer (actuellement parking à côté de l’église Notre-Dame des Grâces).
La Colo…
Et puis voilà une grande découverte: enfin apparut notre nouvelle colonie de vacances, ceci grâce à l’opiniâtreté et la volonté de l’abbé Charles Rossi, d’Alphonse Benasconi, de Pierre Guillermin et bien d’autres encore. On la nomma « Cité Joie de Lancy » à Randa, petit village du Valais, dans la vallée de Saint-Nicolas, près de Zermatt.
Mais, pour aller à la colonie, quelques jours avant le départ, il fallait passer la visite médicale avec le Dr Henny qui, ceci strictement pour la colo, tenait consultation à la cure. Il venait avec tout son attirail du parfait médecin.
Le jour (J), au départ du village de Lancy, le tram 4, avec remorque, stationné devant chez « Zinette », donc sur la place, nous attendait de très bonne heure le matin, au lever du soleil, puis en route pour Cornavin, sans oublier les bagages attachés avec des ficelles, édredons passés par les fenêtres, etc. Un départ surprenant. Juillet-août, 6 semaines de grand air pour les gamins du Grand-Lancy, protestants et catholiques = 105 enfants en 1946, prêts à se hisser sur les sommets vertigineux des 4’000 mètres d’altitude environnants.
Le Foot…
Les grandes idées se suivent et c’est en 1943 que se fonde, pour les sportifs, le club de football « le Saint-Michel FC ». Une bien bonne occupation pour notre jeunesse qui voulait en découdre, comme on dit, il ne restait qu’à gagner… Le tout premier comité officiel était représenté par Emile Schalcher, J.-P. Werthmuller, Alphonse Prini, Jules Néri, Gilbert Pisteur, Jean Servettaz, Pierre Guillermin, Edouard Brun et Victor Lance. Merci à toute cette équipe qui n’est plus là maintenant…
«La route est longue, longue, longue» (Chant de la colo…)
Michel Fontaine
Je découvre votre site, la surprise et l’emotion me submergent, le groupe St Michel, Randa la colo, c’est mon époque, j’y étais et tous ces noms que je connais…… merci pour vos textes
Elisabeth Misteli Dubreuil chemin Sous-Bois Gd Lancy
Chère Madame,
Je vous remercie pour votre message sur ce site et sur mon répondeur. Venez donc à notre arcade: elle est située au ch. des Semailles 2 et elle est ouverte tous les vendredis de 13h à 16h: nous vous recevrons avec grand plaisir!
Cordialement,
Kaarina Lorenzini